Nos anciens combattants

René Bertrand

1925-2019

Né le 16 mars 1925, René, fils d’Élie O. Bertrand et d’Armandine Scott, s’engagea dans la marine à l’âge de 16 ans en falsifiant son âge de deux ans pour être accepté.

Il fit son instruction de base à Montréal puis à l’École des transmissions de Saint-Hyacinthe, QC pour y apprendre le métier de décodeur. Comme son désir d’être marin ne le quittait pas, il se dirigea vers Halifax. Le travail ne manquait pas dans les casernes HMCS Cornwallis, Stadacona et ailleurs dans le port. René restait toujours à l’affût de navires en partance dans le but de s’y engager. Il se porta volontaire sur le dragueur de mines HMCS Vegreville, qui se dirigeait vers Reykjavik en Islande. La présence de près de 1500 sous-marins allemands sillonnant les eaux de l’Atlantique Nord rendit la traversée de l’Atlantique très périlleuse.

Une expédition, entre autres, est restée gravée dans la mémoire de René Bertrand. Le 16 mars 1943, jour de son 18e anniversaire de naissance, il se retrouva au cœur d’une terrible bataille. Peu après avoir été transférés de l’escorte de la Marine royale canadienne à la Marine royale britannique dans l’Atlantique Ouest, les convois SC-122 (convoi lent) et HX-229 (convoi rapide) furent attaqués par des sous-marins allemands. La bataille dura trois jours; 21 navires de la marine marchande canadienne furent coulés. Il faut noter que les navires de la marine marchande n’étaient pas armés. Leur sécurité dépendait des navires et des avions qui les escortaient.

En 1944, René devint quartier-maître et faisait partie de l’équipage qui devait amener la nouvelle corvette HMCS Belleville de Kingston à Halifax. Le port de Halifax était au cœur de la vie militaire. Le trafic militaire était intense : vivres, munitions et troupes étaient en constant mouvement entre l’Europe et le Canada. René monta à bord du transporteur de troupes New Amsterdam pour se rendre en Europe afin de prendre possession du croiseur HMCS Ontario. Ce croiseur, avec ses 1 100 membres d’équipage, était le croiseur le plus moderne de l’Empire britannique. Le jeune canadien de L’Orignal a vécu un moment de grande fierté en avril 1945 lorsque le Red Ensign monta lentement au mât du HMCS Ontario au son l’hymne national.

René Bertrand participa à quelques missions à bord du croiseur HMCS Ontario. Tout d’abord, il escorta un convoi jusqu’à Mourmansk, en Russie, sous la menace constante des avions de la Luftwaffe qui survolaient le convoi. Par la suite, le croiseur se dirigea vers le Pacifique et le Japon. Le trajet était long : de la Méditerranée jusqu’à Hong Kong en passant par le canal de Suez, Aden, au Yémen, avec un arrêt à Colombo et Trincomalee (Ceylan, aujourd’hui le Sri Lanka) pour se ravitailler en carburant. Quelques généraux britanniques embarquèrent à bord du HMCS Ontario afin d’accepter la reddition inconditionnelle du Japon à Hong Kong. Cinq cents membres d’équipage débarquèrent pour aider les Ghurkas, troupes militaires de l’Inde, et veiller à la libération des prisonniers civils. Le couvre-feu était strict : après 18 h 30, aucun Chinois n’était autorisé à se promener sur la rue; seuls les militaires patrouillaient. À Hong Kong, René Bertrand contracta la malaria. De retour sur le navire, il put récupérer grâce à la quinine et à d’autres médicaments.

Pour René, la guerre était finie et il pouvait enfin revenir au Canada. La route fut longue et pleine de détours : de Manille aux Philippines, à Guam, à Pearl Harbour où le HMCS Ontario passa du gris de guerre au blanc, puis à Victoria, en Colombie-Britannique. La dernière étape se fit en train jusqu’à Montréal. René rentra chez lui la veille de Noël 1945.

Cet ancien combattant fut un membre très actif de la Légion royale canadienne de Hawkesbury. Son excellente mémoire devint un atout précieux pour les chercheurs locaux. Ses occupations furent variées : propriétaire de la compagnie René Bertrand Petroleum, conseiller et maire du village de L’Orignal. Pendant son mandat à la mairie, il fit recouvrir le toit de la prison de L’Orignal d’une tôle orangée; il en demeura très fier puisque cette couleur distingue maintenant ce bâtiment unique en Ontario.

M. René Bertrand est décédé le 19 mai 2019, à l’âge de 94 ans.